Les Maquisards de la Solidarité Verte, une association de rebelles pour un espace agricole mieux géré à La Seyne sur mer
Les Maquisards devant la ferme de Mauvéou
26 mars 2011, David Ferri, actuellement président de l’association les Maquisards de la Solidarité Verte, décide, en compagnie de quelques militants du Collectif de défense des terres agricoles de l’ouest varois, de réquisitionner une ancienne terre agricole vouée à la disparition suite à une forte pression immobilière. Il veut y créer un jardin solidaire et partagé, refaire vivre une terre menacée d’être étouffée par le béton c’est à dire donner satisfaction aux habitants du quartier et alentours lassés d’une spéculation immobilière abusive qui prive les Seynois de ces terres agricoles qui firent vivre la ville durant des siècles.
Ce matin de mars David et son équipe arrivent sur une terre en friche. Au loin une résidence énorme a déjà dévasté une part du terrain. Des palmiers remplacent les pins qui parsemaient le champ, une piscine, un parking, un bâtiment à 3 volets sur 3 étages écrasent la partie du champ la plus basse. Le reste est resté en friche dans l’attente d’un nouveau projet immobilier. David y trouve une décharge sauvage. Il nettoie la terre, laboure, ensemence.
Quand on l’interroge à ce propos il dit « C’est un miracle, cette association est née d’un miracle. J’ai retrouvé ma terre, celle de mes ancêtres. J’y serais revenu sur les mains pour la travailler, pour qu’elle redonne ce qu’elle doit donner à ses habitants, des légumes, des fruits, de la vie vraie et non bétonnée ».
David Ferri est de famille paysanne. Il ne comprend pas comment les mairies successives ont pu sacrifier ce qui est le plus cher, la terre et la possibilité d’avoir une alimentation naturelle, de qualité, peu cher et juste à côté de chez soi. Il veut aussi que tous ceux qui ont envie d’apprendre à travailler la terre puissent le faire par le biais des jardins partagés. C’est un projet aux multiples facettes qu’il veut faire naître sur cette terre riche et souple, idéale pour la culture maraîchère.
Ce matin de mars 2011 les Maquisards de la Solidarité Verte prennent jour, l’association naît d’un acte politique, la prise de cette terre dite de Mauvéou et cela en dépit de ce qu’en pense la mairie. L’information est couverte par toute la presse locale à savoir Fr3 Méditerranée, La Marseillaise, Var matin qui se trouve bien sûr aux côtés de David sur le terrain.
Quelques années auparavant David avait été expulsé de sa ferme, la ferme de Mauvéou surplombant quelques hectares de terres agricoles magnifiques devenues constructibles au fil du temps et des mairies.
Ferme de Mauvéou
Par droit de préemption il avait été mis dehors avec sa famille moyennant une petite compensation financière. La mairie précédente ayant décidé d’accaparer les terres, on avait jeté l’homme, sa femme et ses trois filles à la porte de leur maison, de leur terre sans se soucier de ce qu’ils allaient devenir sans logement et sans travail désormais.
Entre temps la mairie ayant changé, le maire, Marc Villemot, devant le fait accompli du 26 mars 2011, décide de laisser les hommes faire leur travail. Ce sera sans compter la redoutable pression immobilière.
Tour à tour David se trouve en mauvaise passe : dénonciation de soi disant mauvais traitements sur les animaux ; on l’insulte, on coupe ses clôtures laissant échapper ses ânes et une petite jument aveugle à 4 heures du matin, il les retrouve à 6kms, perdus ; on lui tue des bêtes, on va même jusqu’à le soupçonner de planter du hachich ! Cela dans le but de le faire céder, de l’avoir « à l’usure ». Mais c’est sans compter la volonté de David qui résiste défendant encore et toujours les valeurs d’une agriculture qu’il sait essentielle.
Il me dit encore « Si un jour les supermarchés ne sont plus alimentés pour une raison quelconque, personne ne pourra manger car l’agriculture de proximité a été réduite à peau de chagrin[1]. Il faut reprendre le pouvoir agricole, il faut pouvoir nourrir les gens sans passer par les grandes multinationales, il faut offrir un service peu coûteux et gage de qualité.
Et David tient parole. Il pratique une agriculture naturelle et nourrit des familles à petit budget voir des sans emplois ou des personnes handicapées. C’est un service social qu’il propose et le consom’acteur comme il aime le nommer, apprécie.
Quand je lui demande « Pour terminer ce court reportage David, qu’aimeriez-vous dire ? »
Il rétorque naturellement « L’idée des Maquisards c’est de faire de cette terre un endroit unique, un jardin péri-urbain ouvert à des pratiques agricoles saines. Nous voulons pouvoir continuer à faire vivre ce jardin maraîcher, que les gens viennent cultiver leurs parcelles de jardins partagés. Nous sommes en train de destiner une parcelle à la pratique du jardin en biodynamie, nous souhaitons pouvoir poursuivre toutes ces activités parce que cette terre est faite pour cela, elle a deux puits qui alimentent la production d’été, elle est riche et fertile et ses habitants aiment la présence d’une nature préservée. Il faut pouvoir trouver un compromis avec la mairie, tout le monde y sera gagnant. »
Mais que propose l’association en dehors du jardin ? Eh bien des activités pédagogiques avec les écoles ou tout type de public. Les enfants, ou les adultes désireux d’en savoir plus, viennent au jardin, ils sont immergés en pleine nature avec une initiation à l’agriculture, au jardinage, aux soins des bêtes.
De même l’association propose des ateliers de jardin pour les gens qui souhaitent apprendre à jardiner. Elle organise également des échanges entre propriétaires de terrains non cultivés et jardiniers potentiels. Enfin elle s’occupe d’opérations de nature propre dans le but de sensibiliser le public au respect de la nature.
Dimanche 4 octobre aura également lieu la 2 ème fête au jardin avec plein d’activités organisées dans le but de satisfaire petits et grands dans une ambiance conviviale et respectueuse de l’environnement.
On souhaite à David de pouvoir continuer toutes ces activités pour le bien de tous. Car sans la terre l’humain n’est plus rien.
23 septembre 2015, Marie Kern
[1] Sous la pression publique et par décision du maire, un domaine récemment acheté par le conservatoire du littoral a décidé de consacrer une part de ses terres à l’agriculture et à la vente de fruits et légumes, c’est le domaine de Fabregas.
Un grand merci Marie pour cet échange. Nous sommes en plus voisins, oh quel bonheur. Je te souhaite un rapide et bon rétablissement.