Inventer d’autres formes de démocratie, d’après Demain de Cyril Dion

Inventer d’autres formes de démocratie,

d’après Demain, le livre de Cyril Dion

 Demain

Force est de constater qu’aujourd’hui nos démocraties sont particulièrement mal menées. La finance ayant tout nivelé, nous assistons à une sorte de Titanic démocratique qui fait sombrer, jour après jour, la souveraineté du peuple dans le néant le plus total.

En lisant Demain de Cyril Dion, j‘ai été interpellée par le chapitre 4 dans lequel l’auteur parle de Réinventer la démocratie. Pour ce faire il invite David Van Reybrouck, écrivain, qui a choisi de se consacrer à la question cruciale de la démocratie parce que le problème est loin d’être résolu. Plus que jamais il est d’actualité car le futur dépend de ce que nous allons faire des systèmes politiques avariés, vendus à la finance et à l’intérêt personnel, qui sont en train de faire sombrer le bateau et l’océan avec.

David Van Reybrouck expose très clairement comment nous pouvons choisir d’œuvrer autrement c’est à dire comment le peuple peut reprendre sa souveraineté, à travers des formes de démocraties plus conformes à la définition de base à savoir que c’est « une doctrine politique d’après laquelle la souveraineté doit appartenir à l’ensemble des citoyens » (définition du petit Robert). Ainsi plusieurs modèles sont exposés dans le livre comme la démocratie délibérative, le tirage au sort ou bien encore l’écriture de la Constitution. Le changement doit venir du peuple et pour le peuple. David Van Reybrouck et Cyril Dion nous expliquent comment cela pourrait être possible dans ce chapitre au demeurant très intéressant.

  • La démocratie délibérative c’est à dire l’organisation de débats publics

Pour comprendre cette forme de démocratie, Didier Van Reybrouck s’appuie sur les recherches de James Fishkin qui dit en substance: « Dans un sondage, on demande aux gens ce qu’ils pensent quand ils ne pensent pas. Il serait plus intéressant d’écouter ce qu’ils pensent quand ils ont eu la chance de penser »[1].

Le principe est celui-ci, demander aux gens ce qu’ils pensent quand ils ont eu la chance de penser ! Organiser des débats publics avec des experts capables d’informer les gens sur des sujets précis ; inciter les gens à se parler, à se rencontrer, c’est une forme de démocratie très prometteuse qui a fait ses preuves dans beaucoup d’endroits dont le Texas.

La question débattue était : « Seriez-vous prêt à payer un peu plus pour installer des énergies renouvelables et développer une économie durable ? »

Des citoyens ont été tirés au sort, ils ont reçu des informations, ils ont débattu durant plusieurs sessions et, finalement, le nombre de citoyens prêts à payer un peu plus a véritablement augmenté. De ce fait le Texas est aujourd’hui l’état qui a le plus grand nombre d’éoliennes aux Etats-Unis.

Ainsi l’organisation de débats publics augmente la qualité de la démocratie tout en redonnant de la responsabilité aux citoyens la constituant.

  • Le tirage au sort

C’est ce qui a été couplé dans l’exemple cité plus haut, avec l’organisation de débats publics.

Tirer au sort des citoyens dans le but de les rendre responsables de décisions importantes pour l’évolution de leur société, est le moyen le plus équitable pour rendre compte de l’opinion publique sans que celle-ci ne soit corrompue par de quelconques recherches d’intérêt personnel.

Le tirage au sort ainsi que le renouvellement fréquent des citoyens chargés de débattre de questions sociales et politiques, permet d’aller au delà des ambitions carriéristes et autres égocentrismes comme les prestations accordées à vie ou les priorités financières.

D’autre part le tirage au sort permet de dépasser l’esprit médiatique qui crée de véritables pops stars avec des politiques tout aussi véreux que people « malgré » eux.

Cet état d’esprit ne correspond absolument pas à la démocratie puisqu’il succombe à la financiarisation de l’image publique.

Le tirage au sort c’est la simplicité et l’équité. Des citoyens lambda se concertent et cela permet de prendre des décisions par rapport au futur de leur société, c’est simple et direct.

  • Des Constitutions flexibles, rédigées par le peuple

Un autre moyen encore permet de redonner une légitimité au peuple dans le système démocratique, c’est la Constitution écrite par le peuple, pour le peuple et flexible selon les données d’un monde social qui va plus vite que jamais.

L’idée a été mise en place en Islande avec une presque réussite, juste après la faillite de la banque Lehman Brothers le 15 septembre 2008. L’histoire est longue et tout ne s’est pas fait simplement mais concrètement, un groupe de citoyens a été formé et une Constitution a été écrite et déposée au Parlement. Trois thèmes de prédilection : la distribution du pouvoir, la transparence et la responsabilité. Les versions successives ont été soumises aux commentaires par le biais des réseaux sociaux jusqu’à la rédaction du texte définitif.

Il s’en est fallu de peu pour que cette Constitution soit adoptée. Hélas les gens ont encore peur de ces formes de démocraties nouvelles, ils sont tellement habitués à la routine médiatique des figures de proues. Des élections ont mis en place le parti de l’Indépendance mais l’exemple prouve que cela peut fonctionner et donner de très bons résultats.

Ce qu’il est important de retenir c’est que cette façon de vivre la démocratie est possible. Rendre les gens responsables également. Seulement, bien sûr, on prend le risque des contestations et des remises en question voilà pourquoi aucun politique ne se confronte à cette nouvelle réalité.

Voilà pourquoi, aussi, à l’instar de Didier Van Reybrouck, je pense que seuls les citoyens peuvent réellement changer la donne en exerçant une pression concrète sur le système actuel.

Didier Van Reybrouck parle du professeur Chouard qui organise des ateliers publics, sensibilisant les citoyens à établir de nouvelles règles communes. Mais je pourrais parler également des réseaux sociaux qui, bien gérés, drainent de nouvelles idées et surtout l’envie de changer les choses.

Demain de nouvelles formes de démocraties peuvent être mises en place, reste à se parler, à être solidaire et surtout à accepter l’idée d’être responsable de la destinée de notre société.

Ce texte pourrait donner lieu à un débat public.

 Marie Kern, le 9 mars 2016

rousseaudefenseliberte

[1] David Van Reybrouck in Demain, page 264

Editions Actes sud/ Domaine du possible

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Marie Kern

Marie Kern - Blogueuse, auteur, accompagnement littéraire d'artistes (peintres ...), rédactrice web (article, contenu rédactionnel, ré-écriture de pages web).

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